L’histoire du grand Tâlib Al-‘Ilm : Baqî Ibn Makhlad رحمه الله
On trouve Dans Tadhkîratou l-Houfâdh (1/194) qu’Aboû Qatan déclare au sujet de son professeur le Savant Chou’ba Ibn l-Hajaj (ou Houjaj) Al-Wassiti Al-Basrî :
» La couleur de ses vêtements était comparable à celle de la terre (Tourab :Sol, terre, poussière) ».
Il était tellement occupé par la recherche de la science et son enseignement qu’il n’avait aucun moment de libre pour laver ses vêtements qui pourtant étaient sales !
L’Imam, l’illustre savant Baqî Ibn Makhlad رحمه الله est né en 201 après l’hégire en Andalousie (Espagne musulmane) et mourut en 276 après l’hégire. Il a 20 ans quand il entend parler d’un homme possédant une science des Traditions prophétiques particulièrement grande : l’Imâm Ahmad Ibn Hanbal رحمه الله.
Le seul problème est que cet illustre savant vit en Irak à Bagdâd, ce qui n’est pas la porte à côté. Ne possédant pas beaucoup d’argent mais très déterminé dans la recherche de la Science, Il décide d’y aller en marchant.
Il descend alors l’Espagne, loue une embarcation pour rejoindre l’Afrique du Nord qu’il traverse à pieds d’Ouest en Est. Et le voilà aux portes de l’Irak (on rapporte que ce voyage dura entre 2 et 5 années).
Survient alors une autre difficulté. Il arrive au moment où l’Imâm Ahmad est opprimé par le pouvoir en place car il refuse d’adhérer au Mou’tazilisme devenu doctrine d’état. D’ailleurs, on lui a depuis peu interdit de donner des cours de science religieuse.
Baqî Ibn Makhlad entend donc des accusations à l’encontre d’Ahmad Ibn Hanbal. Se serait-il trompé et marché toute cette route pour rien ? Il raconte :
« En m’approchant de Bagdâd, j’appris la sanction contre l’imâm, à savoir l’interdiction de continuer ses cours. Je fus effondré. En arrivant dans la ville, j’entrai dans une mosquée où une grande assemblée de science était réunie autour d’un homme qui parlait de narrateurs de Hadîths. Je m’enquis de son identité et on me dit qu’il s’agissait de Yahyâ Ibn Ma’în (rahimahoullah). Je saisis cette occasion en m’approchant de lui et je dis : « Ô Aboû Zakariyyâ ! Qu’Allah te fasse miséricorde ! Je suis un voyageur qui vient de loin et j’aimerais te questionner. »
Il me donna la permission. « Je lui demandai alors à propos de certains narrateurs de Hadîths » Il approuva certains et désapprouva d’autres. Enfin je demandai : « Et que penser d’Ahmad Ibn Hanbal ? » Il me regarda avec étonnement et dit : « C’est moi que tu questionnes à propos de l’Imâm Ahmad ? Par Allah ! C’est l’Imâm des musulmans et le meilleur d’entre eux! »
Sa réponse me remplit de courage. Je me mis à la recherche de la demeure de l’imâm. Une fois devant sa porte, je frappai. L’imâm m’ouvrit.
Je saluai et dis : « Aboû ‘Abdillâh ! J’aimerais étudier les Hadîths et j’ai entrepris un long voyage pour profiter spécialement de tes connaissances. » Il me dit d’entrer de peur que l’on me voie parler avec lui.
Il me demanda : « D’où viens-tu? »
Je lui dis : « De l’Ouest. »
Il dit : « Tu viendrais d’Afrique ? »
Je lui dis : « Vois-tu la mer après l’Afrique ? Il me faut la traverser pour entrer chez moi. »
Il dit : « D’Andalousie (Espagne) ? »
Je dis : « Et je suis venu à pieds. »
Il dit : « Rien ne me serait plus cher que de t’enseigner. Mais vois-tu ma situation ? On m’empêche de donner mes cours. »
Je lui dis alors : « Mais j’ai pu voir des mendiants venir frapper chez toi, et tu sors les remettre quelque chose. »
Il confirma. Je dis : « Alors, je m’habillerai en mendiant, viendrai frapper chez toi. Tu sortiras et, feignant de me donner quelque chose, m’enseignera de cette manière quelques Hadîths. »
L’Imâm Ahmad accepta, mais afin qu’ils ne soient repérés il demanda à Baqî Ibn Makhlad de faire preuve de discrétion, de ne pas fréquenter les assemblées de science et les gens du Hadîth.
Habillé en mendiant et au cri de « La Récompense ! La récompense ! Qu’Allah vous préserve (formule employée par les pauvres de Bagdâd lorsqu’ils souhaitaient inciter les gens à faire des aumônes) » Baqî Ibn Makhlad frappait chaque matin à la porte de l’Imâm Ahmad, et ce dernier sortait, lui remettait un peu de pain et lui enseignait un ou plusieurs Hadîth. C’est de cette façon que Baqî Ibn Makhlad commença son apprentissage. Il raconte qu’il apprit un grand nombre de Hadîth de cette manière.
Lorsque le gouverneur qui avait interdit à l’Imâm Ahmad de donner des cours décéda, celui qui le succéda adhérait à la voie des Salafs Sâlih et aimait les gens de la Sounnah, il donna donc l’autorisation à l’Imâm de dispenser ses cours.
Et dans les assemblées de science l’Imâm Ahmad faisait asseoir Baqî Ibn Makhlad près de lui, il racontait parfois à ses élèves l’histoire de cet étudiant et leur disait
« Celui-ci (Baqî Ibn Makhlad) est vraiment un Tâlib Al-‘Ilm (Etudiant en science religieuse). »
C’est-à-dire que de part sa détermination dans la recherche de la science, sa grande patience (notamment en supportant le fait de s’habiller en mendiant dans but d’apprendre des Hadîths) Baqî Ibn Makhlad mérite le titre de Tâlib Al-Ilm.
Son apprentissage terminé, Baqî Ibn Makhlad retourna en Andalousie. À pieds bien sûr. Il devint un grand savant et à son retour, certains parmi ceux qui étaient ses professeurs avant son voyage comme Yahya Ibn Bakîr devinrent parmi ses élèves.
On rapporte que quand il voyait chez ses élèves un manque d’ardeur, il leur disait, parlant de lui-même mais s’interdisant de se nommer par modestie : « J’ai connu des hommes qui durant leur jeunesse ne trouvaient rien à manger dans leur quête du savoir. Ils se nourrissaient des feuilles qu’ils trouvaient ci et là. J’ai connu des hommes qui durent marcher beaucoup pour acquérir le savoir. J’ai connu des hommes qui durent se priver pour pouvoir acheter de quoi écrire ce qu’ils apprenaient. J’ai connu des hommes qui durent souffrir énormément pour acquérir le savoir. Mais je ne vois plus que des gens paresseux dans leur apprentissage. »
Un jour Baqî Ibn Makhlad tomba malade et ne pu donc assister aux cours de l’Imâm Ahmad (durant quelques jours). Remarquant son absence l’Imâm Ahmad interrogea ses élèves afin de savoir s’i l’un d’entre eux disposait d’informations concernant l’absence de Baqî. L’un d’entre eux l’informa que Baqî était malade et qu’il était donc resté dans sa chambre (une chambre qu’il louait dans ce qui était un sorte d’hôtel).
Accompagné de plusieurs de ses élèves l’Imâm se rendit à l’hôtel où résidait Baqî afin de lui rendre visite, les responsables de l’hôtel furent d’ailleurs surpris de voir débarquer autant de monde avec à leur tête l’Imâm de la Sounnah Ahmad Ibn Hanbal.
l’Imâm Ahmad leur expliqua donc que lui et ses élèves étaient venues rendre visite à Baqî. Le responsable de l’hôtel indiqua donc à tout ce monde sa chambre :
Baqî Ibn Makhlad raconte ensuite: « Alors que j’étais allongé, j’entendis le bruit de tous ces gens présent dans l’hôtel ainsi qu’une personne dire : « [Venez] Il est ici « .
Accourant dans ma chambre le propriétaire de l’hôtel dit : « Ô Aboû ‘Abd Ar-Rahmân, voici Aboû ‘Abdillah Ahmad Ibn Hanbal l’Imâm des musulmans qui est venu te rendre visite. «
Puis l’Imâm Ahmad et ses élèves entrèrent dans la chambre (qui était devenue tellement peuplé qu’il n y avait plus la moindre place). L’Imâm Ahmad s’approcha donc de Baqî et lui dit : « Ô Baqî espère la récompense d’Allah et sache que :
» أيام الصحة لا سقم فيها، و أيام السقم لا صحة فيها »
Ensuite l’Imâm invoqua Allah en sa faveur.
Les élèves présent avaient tous à la main un stylo et un cahier dans lequel ils écrivirent les paroles de l’Imâm Ahmad (en effet ses élèves avaient toujours sur eux de quoi écrire, afin de noter les Fawâid de l’Imâm Ahmad).
Après le départ de l’Imâm Ahmad et ses élèves, on rapporte que le responsable de l’hôtel gronda Baqî en lui demandant la raison pour laquelle il ne leur avait pas dit qu’il était un élève proche de l’Imâm Ahmad.
Et après cet événement, les responsables de l’hôtel lui portèrent une attention particulière le traitant de la meilleures des manières, ils lui apportèrent un lit, une couverture et lui donnaient pour chaque repas la meilleur des nourritures. D’ailleurs Baqî déclarait :
« Grace à la visite d’un homme pieux (lors de ma maladie) les responsables de l’hôtel me traitèrent mieux que ma famille (ou ma femme) lorsque je suis malade. «
Qu’Allah fasse miséricorde à l’Imâm Baqî Ibn Makhlad ainsi qu’à tous les savants musulmans.
(recherche de said rehab)